Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

La promesse 56 du candidat à la présidentielle François Hollande prévoyait la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Après mai 2012, il y a eu des moments d’atermoiements et puis le Premier ministre Jean-Marc Ayrault annonce que cette ratification sera débattue à l’Assemblée Nationale le 22 janvier 2014. Veillées d’armes chez les pro et les contra. Vote à l’Assemblée nationale.

 

Le Comité Fédéral a adressé un courrier aux députés alsaciens UMP et UDI afin de les rendre attentifs à la définition officielle de la langue régionale d’Alsace et à la nécessité d’un vote favorable pour une réforme constitutionnelle en faveur de la ratification de la Charte européenne.

« Nous nous réjouissons de l’engagement très fort des députés alsaciens UMP et UDI en faveur de la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

Votre point de vue paru dans les DNA du 18 janvier « L’alsacien? Une richesse à protéger ! », complété le 20 janvier « Le dialecte et les députés UMP » nous semble cependant ambigu.

Le Hochdeutsch, la forme standard et littéraire de la langue régionale, apparaît dans ce texte au rang de langue imposée à la population par l’Etat Nation allemand. Il omet le rôle prépondérant des Alsaciens lors de la création de cette langue commune grâce aux imprimeurs, dès le XV° siècle, et aux écrivains dont l’apport significatif l’a profondément enrichie. L’Alsace est l’un des grands centres créatifs de la langue allemande. Cet aspect est très bien documenté dans le chapitre « De l’automne du Moyen Âge au siècle des Lumières » du livre « Histoire de la langue régionale d’Alsace » qui vous a été offert par l’AEPLAL.

Le glissement vers le terme « l’alsacien » comme synonyme de « dialectes » constituerait un abandon de la définition historique de la langue régionale, dans ses deux dimensions, allemand dialectal et allemand standard, votée à l’unanimité à plusieurs reprises par le Conseil Régional et les Conseils Généraux. Cette définition a été rappelée par le Président du Conseil Régional lors de l’ouverture des Assises de la langue régionale d’Alsace, le 16 octobre 2013. L’affichage sur la Maison de la Région pour annoncer cette journée prenait en compte ces deux formes de la langue régionale. Cette définition à deux dimensions est aussi réglementaire et officielle dans le cadre de l’Education nationale. Dans la nouvelle brochure ci-jointe publiée par le ministère ce point est particulièrement clair (cf. page 13 du livret « S’ouvrir sur l’Europe avec les langues régionales).

Une politique linguistique efficace doit s’appuyer sur la forme standard de la langue avec des mesures d’accompagnement pour la pratique orale dialectale. Il apparaît malheureusement que, pour l’affichage public des noms d’agglomérations et de rues, seuls les dialectes sont utilisés, et sauf rares exceptions la langue standard est souvent écartée.

Les nouvelles générations, qui n’ont plus guère de contact avec les dialectes, franciseront les noms en les lisant « à la française ». La suppression du suffixe « heim » et la prononciation à la française font perdre tout sens aux noms de nos villages : Avolsheim devient Avelse, Molsheim Molse, Marlenheim Marle, Kogenheim Kojna, Hésingue Hesega, Wittenheim Wettena, Zillisheim Zélésa… Un affichage uniquement dialectal coupe l’Alsace de la plus grande part de son héritage culturel.

Le Hochdeutsch, est historiquement présent dans le cadastre, la toponymie, les noms de lieux et de communes, les archives et aussi les plans et noms de rues. Rappelons que le Hochdeutsch était d’usage courant dans l’enseignement, la religion, la presse et la littérature.

La mise en relation des dialectes (Elsasserditsch) avec le Hochdeutsch, la forme standard apprise à l’école via la voie immersive et bilingue, facilite largement pour les dialectes leur compréhension et leur parler. La présence des deux expressions contribue la prise de conscience de la dimension européenne et globale de notre langue régionale, à la condition que l’allemand ne soit pas présenté seulement comme langue du voisin.

Vous trouverez à l’Ecomusée d’Alsace une signalétique de rues modèle présentant les deux visages de notre langue régionale. Nous avons ainsi la chance de participer à deux grandes civilisations européennes, c’est notre fierté. »