Rencontre Interrégionales des Langues régionales 2013. Thème : Tourisme et Culture

 

En 2013, la fédération des Rencontres interrégionales de langues régionales a tenu son congrès annuel à l’île de La Réunion en décembre.

Ce congrès a été organisé de main de maître par le CCEE de La Réunion (Conseil de la Culture, de l’Education et de l’Environnement). Il a alterné journées studieuses avec exposés et débats, visites (musées, paysages volcaniques, rhumeries), rencontres avec écologistes, concerts (groupes traditionnels, choeurs et chanteurs créoles), réception par la municipalité de St Pierre dans le sud de l’île. Les journées de travail se sont passées dans les Hauts de la Commune du Tampon (Plaine des Cafres).

Le thème retenu a permis de confronter les points de vue. A côté de rentrées financières certaines, des participants ont vu dans le tourisme un risque de folklorisation bêtifiante et de fossilisation pour la langue et la culture, d’autres y ont vu une chance pour faire connaître les richesses créatrices d’une langue et de la culture qui s’y rattache. Sans oublier qu’une culture est multiple.

La délégation alsacienne était formée par Mrs. Gérard Cronenberger, Vice-président délégué du Comité Fédéral, François Schaffner et Tristan Deneschaud, alors chargé de mission au Conseil général du Haut-Rhin.

La contribution du Comité Fédéral au congrès à La Réunion

Tourisme et langue/culture

Le volet touristique d’une politique linguistique comporte la valorisation et l’emploi de la langue (bilinguisme). Elle est à la fois un élément de dépaysement et un élément de distinction positive à l'égard des autres régions françaises ou germanophones. Cela représente un aspect d'attractivité culturelle supplémentaire, qui facilite d'accueil des touristes issus des pays germanophones voisins, le tourisme historique à travers les périodes germanophones.

Actuellement se développe un tourisme des champs de bataille (1914-2014) Thème : réconciliation.

L’Alsace est exotique pour les germanophones et les francophones. Les premiers se sentent assez à l’aise mais se trouvent dans un autre pays. Les seconds sont encore dans le même pays mais se sentent aussi dépaysés.

Cultures partagées

Une politique linguistique globale fait partie de l’aménagement du territoire et du développement durable.

Etat sommaire des lieux

La richesse paysagère, naturelle, culturelle et historiques, la culture et les spectacles vivants en Alsace sont riches, dans une région partie du Rhin Supérieur, d’un monde, d’une civilisation rhénans.

Les intérêts des touristes sont variés : culture vivante, histoire, monument, fêtes et foires, gastronomie. Mais beaucoup de folklore dénaturé, du kitsch se sont installés. La francisation et le monolinguisme s’avancent.

Mais les touristes germanophones représentent en gros un million de nuitées (les 1ers en nombre, soit 36% du total), sans compter les francophones, japonais, anglophones…

Des avancées et propositions

a) Il est important que les professionnels du tourisme -hôtels, fermes-auberges, offices du tourisme, propriétaires de gîtes ruraux, restaurants, débits de boissons, winstubs-, soient formés et incités à l’utilisation prioritaire du dialecte et du Hochdeutsch avec les touristes, notamment d’Europe Centrale en soulignant de la sorte la couleur locale de la région.

Il faudra encourager l’affichage systématique en langue régionale et assurer une animation culturelle d’expression régionale dans tous les sites touristiques en vue de fidéliser la clientèle.

b) Il faudra favoriser le tourisme culturel et éducatif - Bouxwiller, petite ville de 3500 habitants , ancienne capitale d’une grande seigneurie est une ville au patrimoine culturel et à l’histoire méconnus qui permettrait en particulier des séjours scolaires d’exploration- et permettre aux touristes de se familiariser avec notre langue et nos dialectes à l’occasion de leurs séjours.

Exemple de tourisme culturel : Ecomusée d’Ungersheim avec une exposition, un pôle permanent consacré à la langue régionale, passé, présent, avenir.

 

c) Il s’agit de former tous les professionnels chargés de la vente et de la commercialisation des produits spécifiquement alsaciens/rhénans (vins, charcuterie, pains d’épice, pâtisserie, fromages, fruits, produits biologiques de l’agriculture, objets authentiques, poteries…) à l’utilisation systématique de la langue régionale dabs ses deux parties, afin de favoriser la vente de ces productions en liant le culturel au commercial.

Dans ce domaine, il faut veiller à ce que les dénominations d’origine, cadastrales, notamment pour les vins, soient maintenues et valorisées ; elles ne sont pas préjudiciables au commerce, bien au contraire puisqu’elles évitent la banalisation et sont une preuve d’authenticité et de spécificité.

Par ailleurs, il est nécessaire de favoriser le bilinguisme français-allemand/langue régionale du personnel commercial et technique dans le grand commerce bénéficiant d’un apport élevé de consommateurs européens (Auchan, Aldi, Attac, Coop, Leclerc, Lidl, Match, Super U). Si quelques membres du personnel maîtrisent plus ou moins le dialecte, c’est d’autant mieux. Dans ces entreprises il s’agit de mettre en place une politique de l’étiquetage français/allemand systématique, en utilisant pour certains produits caractéristiques des vocables dialectaux. Mais aussi des inscriptions et de la signalétique (gondoles, panneaux).

d) En milieu rural, dans les petites villes et bourgs

- Organiser un accueil linguistique pour les hôtes, les touristes, apprendre la langue et la culture régionales au cours de vacances actives et culturelles, afin d’allonger les séjours touristiques.

- Création de villages d’artistes alsaciens (potiers, peintres, sculpteurs, ferronniers…) Dans la poterie, il existe deux villages traditionnels. Cristallerie, Musée Lalique (Wingen/Moder). Musée du fromage (Munster)

- Soirées d’expression alsacienne avec dégustation des produits du terroir et boissons sans folklore désuet.

- Création de sentiers poétiques avec plusieurs auteurs avec des textes dans les deux composantes de la langue. 7 existent. Sentiers regroupant plusieurs auteurs ou un seul (par ex. André Weckmann dans son village natal (Steinbourg/Steinburg/Steiweri.)

- Offrir des cours d’initiation à la langue pour les touristes. Voire des vacances linguistiques. Le tourisme, mise en place de séjours linguistiques (dialecte, allemand standard, mais aussi le français) pour des vacances actives, des séjours intelligents

Mettre en place dans la langue du pays (dialectes et Hochdeutsch) un ensemble d’activités et de spectacles de nature à égayer ces séjours et à les prolonger

 

- Weihnachten im Elsass (dans les deux expressions de la langue). Redéployer certains marchés de Noël réducteurs.

- Ferme éducative bilingue: présentation faite en dialecte et/ou en Hochdeutsch pour les scolaires.

- Développement de présentations en dialecte et/ou en Hochdeutsch dans tous les centres pour la nature.

Assurer parallèlement la formation des animateurs est indispensable. Par ailleurs, il faut mettre en place des formations complémentaires pour les animateurs ou autres qui sont déjà dans le métier.

Donc : Il s’agit de développer les activités locales pour maintenir les derniers locuteurs sur place dans des contrées, dont certaines se dépeuplent. Il s’agit de réactiver la spécificité linguistique qu’il faut valoriser à travers l’école, les activités post et périscolaires, la culture, afin de donner l’image et de construire la réalité d’une région bilingue. Les efforts consentis à Lembach (Bas-Rhin) avec le P’tit Fleck (château du Fleckenstein) permettent avec d’autres éléments (marchés paysans) de faire vivre la Haute Vallée de la Sauer. Des réflexions et des amorces de réalisation se font jour dans le Parc des Ballons des Vosges du Sud alsacien et vosgien. Le concept porteur pour tout le massif vosgien pourrait être l’eau, l’air, la vie, la langue et la culture originales des régions composant le massif.

- Affichage : exemples : Bienvenue à la ferme/ Willkommen, Willkomma uff’m Bürehof, Malkerei ; étiquetage de produits en langue régionale. Ferme-auberge en langue régionale, accueil dans la langue du pays, étiquettes des bouteilles de vins d’Alsace.

- Création et développement de l’emploi: à temps partiel, saisonnier, des métiers d’hiver et d'été, animateurs ayant plusieurs professions, moniteur de ski, de randonnées, et animateurs de soirées en été, conteuses, conteurs dans les deux parties de la langue.

- Créer des spectacles authentiques locaux, découverte de la langue dans ses deux parties et de la culture régionales.

- Des activités éducatives en langue régionale pour les enfants.

- Pour des associations externes: former les personnes et créer des automatismes.

e) prendre en compte que la civilisation rhénane est une civilisation urbaine (notamment dans les grandes villes), que les campagnes ne sont qu’un aspect du tourisme culturel, aspect trop souvent d’un folklorise bêtifiant.

Les contrats de développement local doivent prendre en compte la problématique de la langue dans différents domaines, par exemple la signalétique interne et externe, les actions de formation, le développement touristique, les dépliants…

 

Le Rhin Supérieur (villes, plaine, collines viticoles, montagnes) représente un extraordinaire espace de vie dont l’importance est essentielle pour l’avenir des populations européennes et l’équilibre de leurs économies.

Il est évident que le phénomène culturel spécifique à l'Alsace, qui est une région de l'univers culturel germanique devenue française et étant passée d'un univers culturel à un autre à plusieurs reprises de son histoire durant les quatre derniers siècles, possède un patrimoine architectural et culturel vaste, diversifié. Il est, avec une certaine richesse de nos paysages et une gastronomie variée et réputée, la clef de notre tourisme.

 

A cet égard, il est évident que l'intimité linguistique créée par une communauté de langues à la fois avec nos voisins d'Europe centrale et avec les régions francophones de notre pays et de l'ouest européen, et même d'autres continents, et en sens contraire le dépaysement créé par notre dualité linguistique et culturelle, confèrent à notre langue régionale une importance considérable, peut-être même fondamentale, dans l'attraction et l'attractivité touristiques.

 

Il convient aussi de montrer la valeur ajoutée que représente la langue régionale et non la présenter comme un obstacle. Utiliser la langue régionale, faire valoir la culture régionale dans toutes ses dimensions, c’est provoquer le dépaysement et l’exotisme recherchés.

 

Cette originalité, voire cet exotisme alsacien est un élément de promotion de la région à l’opposé d’une démarche de banalisation et d’une folklorisation réductrices.

gc fs

Contribution du Comité Fédéral